CHASSEUR EMBARQUÉ MONOPLACE, MONORÉACTEUR
"Si vous ne connaissez pas les F-8, vous ne connaissez pas les chasseurs".
HISTORIQUE
Genèse du programme et une carrière glorieuse au sein de l'US Navy et l'USMC
Afin de moderniser les escadrons de chasse embarquée de la Marine Américaine, 22 projets furent étudiés en 1952. Parmi eux, le F-8 Crusader, construit par la firme Vought qui remporta la compétition en mai 1953. Trois prototypes XF-8U (XF-8A) furent commandés (en fait seulement deux furent construits) ; le premier prit l'air le 25 mars 1955, l'intégralité de la voilure est à incidence variable (jusqu'à 7 degrés positifs sur les appareils américains) permettant de garder une assiette idéale pour le fuselage aux vitesses réduites comme lors des appontages. Les prototypes étaient équipés du réacteur J57-11 de Pratt & Whitney de 6 175 kg de poussée, remplacé peu après par un J57-4A de 7310 kg de poussée. Les premiers F-8A furent livrés en mars 1957 au squadron de la Navy VF-32 ; un total de 318 F-8A furent construits. Le Crusader fut un appareil très efficace au sein de l'US Navy et des Marines au Vietnam, ainsi il fut surnommé "the Mig killer" (le tueur de Mig) au vue des succès en combat air-air contre ces appareils. En effet l'appareil abattit quelques 14 Mig-17 et 4 Mig-21 durant cette guerre. Les années de guerre au Vietnam ayant fortement entamé leur potentiel, l'activité des Crusader décline, et se termine sur la côte est en octobre 1969, lors de la dissolution des VF-13 Fighting Thirteen et VF-62 Yellow Tails. Un programme de modernisation est alors lancé entre 1967 et 1969 ; les F-8B, C, D et E deviennent des L, K, H et les RF-8A des RF-8G. De nouvelles voilures, un démarreur autonome et un nouveau système de contre-mesures sont installés ; la capacité d'emport est augmentée, enfin, les cadres supports des trains et de la crosse sont renforcés. Deux quilles ventrales sont installées sur les F-8L et G n'en possédant pas auparavant. Les F-8J reçoivent deux systèmes hypersustentateurs identiques à ceux de la version française. De 1957 à 1982, l'USN et l'USMC ont accumulé 2 360 000 heures de vol, et quelques 385 000 appontages sur Crusader !
Les RF-8G restent en service jusqu'au 30 juin 1982, date de la dissolution de la VFP-63. Enfin, la dernière unité détentrice de Crusader, la VFP-206 Hawkeyes, retire ses appareils le 29 mars 1987.
Les différentes versions du Crusader :
L'unique intercepteur de l'Aéronautique Navale pendant 35 ans
Dans le but de moderniser la
défense aérienne du Groupe Aéronaval, alors
assurée par le vénérable Aquilon, la Marine
Nationale Française émet un appel d'offres. Le
constructeur français Dassault, ne peut y répondre car
sa probable version navalisée du Mirage a une vitesse
d'approche trop élevée ; la Marine se tourne alors
évidement vers les États-Unis qui ont le F-8 Crusader
et le F-4 Phantom II de disponible. Le CC Hurel (Bureau des
Études Techniques), M. Faucheux du Service Technique
Aéronautique et un ingénieur y sont
dépêchés pour définir quel
appareil sera le plus apte à remplir la
défense aérienne du Foch et du
Clemenceau récemment mis en service. Le
Phantom étant trop encombrant pour le pont des petits
porte-avions français, le Crusader est donc
sélectionné. Une campagne d'évaluation
est alors effectuée à bord du
Clemenceau le 16 mars 1962 par deux F-8 de la VF-32
basée sur l'USS Saratoga. La firme
Ling-Temco-Vought (LTV) s'engage à produire un
intercepteur tout-temps à partir du F8U-2NE (F-8E),
mais avec un hypersustentation améliorée et la
capacité d'emport du missile air-air MATRA R530.
L'appareil est désigné F-8E (FN). Le contrat
AM-114-104 de 65 millions de $ porte sur une commande
initiale de quarante monoplaces et six biplaces, ainsi qu'un
important stock de pièces de rechanges et de
moteurs.
Le congrès américain annule la production du
Twosader (biplace) et de ce fait la Marine Nationale
transforme sa commande en 42 monoplaces (BuAer 151732 à
151773). Puis, quatre pilotes (LV Goupil, LV de la Fournière,
EV Robillard, OE Philippe) partent en formation aux USA à
Cecil Field (FL) au sein des Hell's Razors de la VF-174 où ils
sont lâchés le 6 mai 1963. Le prototype du F8U-2NE
(BuAer 147036 - ancien F-8D transformé) prend l'air pour la
première fois le 27 février 1964. Il est
caractérisé par sa nouvelle voilure mais aussi par une
auto-manette d'approche, un avertisseur de décrochage, la
capacité de recevoir le missile air-air Matra R530, le
réacteur J57-P-20A et des instruments de
télémesures.
Les deuxième, troisième et quatrième appareils
de série prennent part au essais système d'armes. Les
essais de catapultages et appontages ont lieu en novembre 1964
à bord de l'USS Sangri-La (CV-38), dont les dimensions
sont relativement proche des Clemenceau. Les N° 2 et 3
sont mis à contribution, et pilotés par Dick Gralow,
Goupil et James H. Flatley. Les 13 premiers exemplaires sont
chargés sur le porte-avions Arromanches à Norfolk
(Virginie) le 6 octobre 1964. Ils arrivent à St-Nazaire le 4
novembre. Les 29 derniers sont embarqués sur le PA Foch
au début de 1965.
La flottille 12.F est
reconstituée le 15 octobre 1964 avec son armement de 12
appareils. Le 1er mars 1965, c'est au tour de la fameuse flottille
14.F, auparavant sur Corsair
de recevoir l'appareil. Du 28 avril au 6 mai 1965, quatre appareils
effectuent une campagne à bord du Clemenceau . Un
détachement de la CEPA, le DEM 530 est crée le 13
janvier 1965 ; il a pour but d'adapter le Matra 530 au Crusader. Le 6
juillet 1965, le Crouze effectue ses premiers ravitaillements en vol
sur Étendard
IVP. Le 8 septembre les deux
flottilles de F-8 sont regroupées au sein du GAN 2 (Groupe
AéroNavale 2). Les Crusader sont officiellement
opérationnels le 1er mars 1966. La 12.F
quitte le 30 juillet 1968, la base de Lann-Bihoué
et s'installe à Landivisiau,
elle sera suivie par la 14.F
quelques jours plus tard. En 1979, les F-8 sont remplacés par
le Dassault Super-Etendard
au sein de la 14.F. En octobre 1974 (Clemenceau) et juin 1977
(Foch), plusieurs appareils de la 14.F prennent part aux
missions Saphir (I et II) au-dessus de Djibouti. Le 7 mai 1977, deux
Crusader partent en patrouille séparées contre
d'hypothétiques F-100 Super-Sabre de l'Armée de l'Air
Française (4/11 Jura) stationnés sur la base
interarmées de Djibouti. Le leader croise deux chasseurs, il
engage le combat (qui est censé être un exercice) et
appelle son ailier à la rescousse.....en fait il s'agit de
deux Mig-21 Fishbed yéménites, chacun armé de
quatre missiles. Les deux appareils français passent
l'armement sur "on" mais finalement chacun repart de son
côté. Il s'agit de la seule et unique interception
guerrière d'un Crusader
français. Le 7 septembre 1982, des F-8
embarquent sur le Foch
pour la mission Olifant IV, direction le Liban. Ils y
retourneront pour les missions Olifant XVII et Olifant XX
respectivement le 2 septembre 1983 et le 25 janvier 1984. En
octobre 1984, afin de calmer le colonel Khadafi, la France
envoie le porte-avions Foch dans le cadre de
l'opération Mirmillon au large des côtes
libyennes avec notamment les fameux intercepteurs de la 12.F
à son bord. L'aggravation de la situation dans le
golfe arabo-persique engendrée par le conflit
Iran-Irak a pour conséquence, le déploiement
à partir du 30 juillet 1987 d'un groupe
aéronaval centré autour du Clemenceau
dont le groupe aérien comprend notamment les F-8E de
la 12.F. La mission Prométhée s'achève
le 16 septembre 1988.
En 1993 démarre les multiples opérations Balbuzard
au-dessus de l'ex-Yougoslavie à partir des deux porte-avions
croisant en Mer Adriatique. Celles-ci ne vont s'achever qu'en juin
1999 avec la fin de l'opération Trident au-dessus du
Kosovo.
Après son départ en 1985 du groupe d'études européen qui donnera naissance plus tard à l'Eurofighter EF-2000 Typhoon, la France décide de faire cavalier seul et lance le programme Rafale. Mais le Rafale M à l'époque ne pouvait pas être livré avant 1996, ce qui a conduit la Marine à envisager de louer des chasseurs américains F/A-18 Hornet ou alors moderniser en profondeur ses Crusader.
En décembre 1989, le lobby
militaro-industriel français a gagné : la Marine
commandera des Rafale M et dix-sept Crusader vont être
rénovés sans être modernisés à
l'AIA de Cuers entre 1990 et 1997 à raison d'une machine tous
les 18 mois. Le F-8E qui devient F-8P reçoit les
améliorations suivantes : -Changement de la pieuvre
électrique.
Le premier exemplaire (N°35) effectue une campagne d'essais sur
le Clemenceau en avril 1993. En mai 1996, le sort du "Crouze"
est scellé : les derniers exemplaires seront retirés le
31 décembre 1999 au plus tard. Le F-8 étant à
l'époque, l'appareil de l'Aéronautique Navale qui
nécessitait le plus grand nombre d'heure de maintenance. En
effet pour une heure de vol il fallait 67 heures de maintenance (en
incluant les grandes visites à Cuers) !
-Révision
générale du radar et des commandes de
vol.
-Installation d'un ILS
(Instrument Landing
System).
-Installation de l'IFF
mode 4.
-Nouvelle centrale de
cap et de verticale.
-Nouveau
détecteur d'alerte
SHERLOC.
-Installation du
siège éjectable Martin-Baker Mk-7 (0/0)
à la place du Mk-F5A-F (0/120).
Du 4 au 29 octobre 1999, trois
exemplaires (N°11, 34 et 39) participent à partir du PA
Foch (R 99) à l'exercice Pean 99 en opération
aux côtés des porte-aéronefs européens
Illustrious, Principe de Asturias et
Garibaldi.
Après 140 000 heures de vol et 25 000
atterrissages/appontages, la demi-douzaine (N°7, 10, 11, 34 et
39) d'exemplaires d'un des derniers représentants des
"Century Fighters" est retirée en cette fin de
millénaire, le 15 décembre 1999 sur la base de
Landivisiau. Depuis le 18 mai 2001, sur la base de Landivisiau en
Bretagne, la flottille 12.F est de nouveau opérationnel avec
ses cinq Rafale M F1. Elle devrait recevoir sa dotation
complète (12 appareils) d'ici la fin de l'année 2001 ou
en début 2002. Elle a déjà participé
à l'exercice Trident d'Or du 21 mai au 1er juin 2001 à
bord du porte-avions nucléaire Charles
de Gaulle aux
côtés des E-2C
Hawkeye de la
4.F
et des Super-Etendard
Modernisés des
flottilles 17.F
et 11.F.
F-8E/P
CRUSADER DE L'AÉRONAUTIQUE NAVALE Numéro Statut Numéro Statut 1 Détruit le 12 juin
1987. 22 Détruit le 8
décembre 1977. 2 Détruit le 4
février 1989. 23 Modernisé en janvier
1996. 3 Modernisé en
décembre 1993. 24 Détruit le 24
novembre 1970. 4 Modernisé en janvier
1994. Réformé en juin 1997. 25 Détruit le 26 octobre
1981. 5 Modernisé en juin
1993. Réformé le 10 juin 1997. 26 Détruit le 2 novembre
1971. 6 Détruit le 27 mars
1992. 27 Modernisé en
février 1994. Détruit le 30 mars 1955.
7 Modernisé en juin
1994. 28 Détruit le 29
septembre 1965. 8 Modernisé en
septembre 1996 29 Modernisé en avril
1994. 9 Détruit le 28 janvier
1977. 30 Détruit le 9 mai
1985. 10 Modernisé en octobre
1993. 31 Modernisé en janvier
1993. Détruit le 20 juillet 1995. 11 Modernisé en juin
1994. 32 Modernisé en octobre
1996. 12 Détruit le 9 juin
1986. 33 Détruit le 4 mai
1990. 13 Détruit le 1er
février 1977. 34 Modernisé en
août 1993. 14 Détruit le 9 mai
1985. 35 Modernisé en proto
F-8P en 1993. 15 Détruit le 14 avril
1967. 36 Détruit le 22 octobre
1970. 16 Arrêté de vol
le 18 avril 1986. CEAN Rochefort. 37 Modernisé en janvier
1994. Détruit le 20 août 1997. 17 Réformé le 8
février 1989 aprés une collision avec un
ATL-1. 38 Détruit le 3 janvier
1978. 18 Détruit le 6 octobre
1970. 39 Modernisé en
février 1997. 19 Modernisé en
décembre 1994. Réformé en
décembre 1997. 40 Détruit le 18 juin
1983. 20 Détruit le 13 juin
1983. 41 Détruit le 14 mai
1980. 21 Détruit le 24 juillet
1968. 42 Détruit le 14 janvier
1988.
= pilote éjecté
= pilote
décédé
ARMEMENTS -Quatre canons 20 mm
Colt-Browing avec 125 obus
chacun.
-Quatre missiles air-air
courte portée Sidewinder 1A. Son utilisation est
abandonnée en 1986.
-Deux missiles air-air
Matra 530. Suite à des problèmes de
fiabilité (taux d'échec de 65% en 1980), il
est abandonné en 1991.
-Deux
missiles air-air courte portée Matra R550 Magic
2.
-Treuil
à gauche du fuselage pour cible DELMAR DF-14 ou HAYES
TA-7. Système abandonné en 1988.
ÉQUIPEMENTS
ÉLECTRONIQUES ET DIVERS F-8E/P
: F-8E
: F-8P
:
Pour
en savoir plus
-AN/APQ 104 radar (nav.
: 60 NM/ interception : 25 NM).
-Une perche de
ravitaillement.
-Un turboréacteur
Pratt & Whitney J57-P-20A de 5,7 t de poussée
à sec et 8,2 t avec
postcombustion.
-Siège
éjectable Martin-Baker Mk-F5A-F
(0/120).
-Antenne TRAP
35.
-Siège
éjectable Martin-Baker Mk-7
(0/0).
-GPS.
-VOR/ILS.
-IFF mode
4.
-Antennes VHF/
UHF.
-Tacan.
-Radio-altimètre.
-ADF.
-Détecteur
d'alerte Sherlock.
sources :
"Les Crusader Français en action"
Jean-Marie Gall - LELA Presse - 1997
"Histoire Succincte de
l'Aéronautique Navale (1910-1998)" Vice-Amiral Roger Vercken -
ARDHAN - 1998