Le CC (R) Daniel PIERRE, ancien pilote d'essais du Jaguar M, explique ci-dessous, les principales raisons de l'échec, puis de l'abandon du programme Jaguar M par la Marine Nationale en janvier 1973.

Le programme
-L'organisation franco-britannique était très lourde : plusieurs mois étaient souvent nécessaires pour décider d'une modification des prototypes.
-La volonté britannique de rendre le Jaguar supersonique contraint à l'utilisation de moteurs avec postcombustion (P.C.) peu compatibles avec la mission d'attaque à basse altitude.
-L'alourdissement consécutif à l'augmentation des performances demandées amène une sous-motorisation de l'appareil :
Prototype Jaguar M-05 lors de son vol initial le 14 novembre 1969 à Melun-Villaroche. (©Daniel Pierre)Les moteurs initiaux ont une poussée unitaire de 2.000 kgp (19.6 kN) en sec et 3.000 kgp (29.4 kN) avec P.C. Ces chiffres sont à comparer avec les performances des deux moteurs Adour Mk804 équipant les Jaguar anglais et qui développent 47.4 kN en sec et 71.5 kN avec la postcombustion !
Le décollage et la montée se font toujours P.C. allumée. L'excellente consommation spécifique du moteur sec en croisière, ne peut compenser cette consommation initiale trop importante avec P.C.
Pendant un convoyage le M05 et son Étendard IV d'accompagnement eurent la même consommation.



Équipements de navigation et d'attaque
Très réduits sur les versions A et E, un peu plus développés sur le M, mais le système de navigation reposait sur un radar Doppler et non sur une centrale à inertie. La Marine n'étant cependant pas maîtresse du cahier des charges des différentes versions.



Emploi sur porte-avions
Prototype Jaguar M-05 en approche sur le PA Clemenceau.(©Daniel Pierre)La sous-motorisation du M imposait que tout catapultage s'effectue avec la P.C. (assez dangereux car les flammes étaient très proches du pare-souffle de la catapulte). De même, le surgonflage du train avant donnait à l'appareil une assiette telle que, les flammes P.C. touchaient également le pont à proximité de la catapulte.Jaguar M05 à l'appontage sur le Clemenceau. (©Marine Nationale)Pour les essais, le pare-souffle était maintenu rentré et une plaque d'acier de 20 mm d'épaisseur avait été soudée sur le pont pour éviter son échauffement, ce qui était loin d'un emploi opérationnel. Pendant tous les catapultages et particulièrement avec des charges externes, la catapulte était sollicitée à la limite de ses possibilités (5g à 5,5g), ce qui induisit les incidents structuraux qui mirent fin à la seconde campagne sur porte-avions (attaches moteur fêlées sur le M05).
Tout ceci n'étant pas très opérationnel, une série de mesures fut envisagée pour améliorer le comportement du Jaguar à bord :
-Allongement des catapultes des porte-avions.
-Refroidissement du pare-souffle et du pont par une circulation d'eau.
-Nouvelle voilure pour le M05.
Le coût de ces modifications, plus l'adjonction de la P.C. modulable, nécessaire à l'appontage monomoteur avec charges externes, devenait excessif pour la Marine Nationale qui avait également quelques doutes sur la tenue structurale de l'avion au vieillissement (problème de corrosion du NIDA sur Atlantic qui pouvait sur Jaguar, entre autres).

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